Route, drogue et Ontario

Parking
Photo @ Jimmy Voyer

Le remorqueur du CAA nous apporta juste assez d’essence pour que nous puissions nous rendre à la station la plus proche ouverte 24heures. Je me remerciais d’avoir pris un abonnement OR au CAA. Tortue pleine de gaz, mon orgueil défait, encore un fois, nous étions repartis pour une autre tournée Ontarienne. Cette fois, avec une personne en plus et moins de spectacles à faire.

Cette fois, ce n’était pas l’été et il ne faisait pas chaud, mais c’était une bonne chose pour le moteur de la vieille Tortue qui commençait à être fatigué de tous ces interminables voyages. La route était maintenant connue mais malgré tout, ce voyage m’a paru interminable. Cela nous a pris finalement plus de 14 heures pour nous rendre à Welland où nous avions notre premier spectacle. En arrivant à destination, mes yeux voulaient sortir de leurs orbites et j’avais toujours la sensation que le moteur vrombissait, mais il était bien arrêté. Nous avions une nuit pour nous remettre de ce voyage avant notre premier spectacle.

Heureusement, nous avions une place à coucher. Ce fut la première chose que je fis, après avoir fait connaissance avec la fille qui nous hébergeait. Cette nuit là, mes rêve étaient remplis de route, de bourdonnements. Je me réveillai en sursaut et en sueur après une sortie de piste dans un de mes rêve, il faisait encore noir et les autres dormaient encore. L’odeur du lendemain de veille qui immergeait de la pièce, m’indiquait qu’ils avaient fêté sans moi. Je ne m’endormais plus, alors je me
levai dans la noirceur et partis à l’extérieur pour me rendre dans la van. Le froid du matin augmenta mon mal de coeur matinal, dû à ma nuit tumultueuse.

Installé sur la banquette de la Tortue, je mis de la musique, question de faire fuir mon angoisse grandissante. Je n’allais pas très bien, pour la première fois depuis longtemps, je ne me sentais pas à la bonne place. J’avais un pressentiment que ce voyage n’était pas une bonne chose. C’était sûrement dû à la fatigue ou à ma crise imminente de panique. Puis, comme pour me sauver de ces pensées, mon chanteur arriva dans la Tortue. Ce qui chassa, heureusement, ma crise. Nous avons passé quelques moments à parler de musique. La journée passa tranquillement, mais je ne sentais toujours pas que ce voyage était une bonne chose et je ne me sentais pas prêt à faire un spectacle.

Le soir arriva et mon bassiste nous annonça que deux spectacles étaient annulés. Celui du soir même et celui du lendemain. Déçus, nous avons décidé d’aller voir une spectacle à Niagara Falls. Arrivés sur les lieux du spectacle, nous avons discuté avant l’ouverture des portes. Le nouveau guitariste disait être frustré de cette situation. Il trouvait que la tournée était mal organisée et que nous étions mal logés. Il n’en fallait pas plus pour que les esprits s’échauffent. Mon bassiste faisait tout ce qu’il pouvait pour trouver les meilleurs spectacles. Le fait est qu’être un petit groupe indépendant et inconnu n’était pas attirant pour les promoteurs de spectacles. Plus le nouveau guitariste se plaignait, plus nous prenions personnel ses remarques. Nous savions que notre bassiste se démenait et que c’était grâce à lui si nous pouvions jouer dans plusieurs spectacles. La frustration monta encore d’un cran.

Je ne dit pas un mot durant cette engueulade, mais je compris que le nouveau guitariste n’était pas fait pour nous. Nous étions habitués de jongler avec ce genre de situation et nous savions que la panique et la frustration ne menait à rien de bon. Il avait changé l’atmosphère du groupe d’une manière négative, ce que nous n’avions surtout pas besoin. À la première embûche, il paniquait et nous engueulait comme si tout était de notre faute. Nous avions travaillé fort pour nous rendre où nous étions et l’Ontario n’était pas une place facile pour un groupe comme nous. Au lieu de briser notre moral, il nous a fait nous rendre compte que nous étions bien juste nous 4. Alors, à moins d’un revirement de situation, il ne faisait déjà plus parti du groupe. Donc, il lui restait 3 spectacles pour nous faire changer d’avis.

Au lieu de jouer, nous sommes finalement allés voir le spectacle a Niagara Falls qui était vraiment bon. Dans la foule, nous voyions déjà que deux clans s’étaient formés, que le groupe était maintenant divisé; il y avait nous et il y avait lui. Après le spectacle, nous sommes allés dormir dans le stationnement d’un épicerie.

le lendemain matin.

La van puait, une odeur que seul 5 gars qui n’ont pas eu de douche dernièrement, entassés dans la Tortue, avec le soleil qui leur plombe directement dessus, peuvent avoir. Le tapis qui recouvrait tout l’intérieur de la van n’aidait sûrement pas. Malgré qu’il faisait frisquet dehors, dans la van il faisait chaud. Une envie me réveilla, mais je ne voulait pas sortir de mon sleeping bag. Je dormais sur le lit de la van, ce qui ne me donnait aucune autre option de sortie que de passer sur le corps de celui qui était directement en bas de moi. Mais cette envie devenue soudainement prioritaire. Je me glissai en bas du lit, ce qui eut comme effet direct de réveiller tout le monde. Je sortis de la van et me rendis compte que j’avais une jambe dysfonctionnelle, dûe à ma position de sommeil. Je titubai jusqu’au boisé le plus près et me soulageai.

En retournant à la van, je me rendis compte que le stationnement était bondé de gens entrain de faire leur épicerie. La majorité d’entre eux nous regardaient d’un air perplexe. Après que tout le monde ait été au boisé arroser la végétation, je pris le volant pour aller dans un Tim Horton pour déjeuner. À tête reposée et surtout plus calme que la veille, nous faisions le constat des dégâts de la tournée. Sur 5 dates prévues en Ontario, 2 étaient annulées. Conséquence, il nous restait 3 spectacles à jouer. Donc, le plan de la journée était de tenter de trouver un spectacle où nous pourrions nous incruster.

Après des recherches infructueuses, nous avons décidé de passer la soirée chez l’une de nos amie. C’est chez cette amie que j’ai pu parfaire le plus mon anglais. Je la trouvais très jolie cette amie et je sentais que des rapprochements auraient été possibles. Cependant, ma gêne et ma timidité firent en sorte que je passai la nuit seul dans mon sac de couchage.

Ce matin là, j’étais prêt, enfin un spectacle et de la route. Ce soir là, notre spectacle était dans une salle mythique où avait joué quelques grand bands de ce monde tel que AC/DC et The Tea Party. Cette soirée allait être prometteuse. Le point de rencontre des bands était le restaurant East Side Mario’s. Je ne sais pas pourquoi ils avaient choisi cette place mais ce n’était pas l’idée du siècle. Cela faisait quelques jours que nous mangions peu et j’avais faim. J’ai dévoré le pain qui était à volonté et bu 10 litres de liqueur qui était aussi à volonté. Dans le top 10 des choses à ne pas faire avant un spectacle, c’en était deux.

Nous sommes arrivés au spectacle et avons bu quelques bières pour faire passer notre souper qui ne voulait pas passer. Puis, trop vite à mon goût, est venu le temps de jouer. Ce fut une catastrophe ! Après la première chanson, j’avais une crampe dans l’estomac. Je n’étais pas capable de jouer à la vitesse régulière tellement mon souffle était court. Je n’étais pas le seul dans cet état, je voyais les autres se tourner pour me lancer des regards d’essoufflement. De plus, mon chanteur ne chantait plus les chansons au complet. À la fin du spectacle, je n’avais même pas détruit ma batterie, je suis tout simplement parti à la course pour aller prendre l’air, où mon vocal était déjà, en train de se retenir pour ne pas vomir son souper.

Après avoir repris nos esprits, nous avons remis notre équipement dans la Tortue et sommes repartis pour dormir à l’extérieur de la ville. La déception couvrait nos visages. Mis à part le nouveau, qui était fou de rage, puisque selon lui il n’y avait pas eu assez de monde. Pour notre part, il y en eu trop, vu notre piètre performance.

Pour décompresser, les gars du band se sont ouverts un bière. Quelques instants plus tard, j’aperçus des gyrophares. La police était en arrière de nous et voulait qu’on se range sur l’accotement. J’ai crié dans la van :

– POLICE, serrez vos bières pis mettez les fausses ceintures.

La police à ma porte me jeta sa lampe directement dans les yeux :

– How many people in this van?
– Quoi eee What? eeee cinq people
– Where are you came from ?
– Québec
-Where do you go ?
– À Wellland monsieur

Au même instant, l’autre policier ouvrit la porte arrière et regarda les passagers de cette mystérieuse van.

– Ok. Sirs, have you seen a misterious blackman somewhere around here ?

Nous n’étions pas les personnes qu’ils recherchaient. Nous avons cependant vu qu’ils nous trouvaient étranges, entassés dans cette van. Après que la police fut partie, les passagers arrières décidèrent d’allumer un joint pour détendre l’atmosphère. Bien que je ne trouvais pas l’idée si géniale, cela ne me dérangeait pas plus. Cinq kilomètres plus loin, un barrage de police nous attendait :

-BARRAGE DE POLICE CALICE

Là, on était dans la merde. En vitesse, nous avons caché les bières et lancé le joint qui restait par la craque de la porte. L’odeur cannabique planait toujours dans l’air. La policière arriva rapidement à la porte. Je baissai la fenêtre, ce qui lui renvoya un bonne quantité de boucane à la figure. Elle tourna la tête vers son coéquipier et dit :

– OOOhh, It is the Quebecers. Ok go….drive safely, qu’elle dit avec un sourire en coin.

Donc, nous somme repartis avec une 2ème frousse pour rien. À partir de ce moment, aucune bière ni drogue ne devait circuler dans l’habitacle.

À suivre !!!

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